Youssef El Alaoui
Université de Rouen
Dans le prolongement du colloque international D’une rive à l’autre,organisé à la Manouba (Tunis) en avril 2006 par le GEMAS et le CÉRÉdI [1], je voudrais ici vous parler de la première phase de l’expulsion des Morisques – ces derniers descendants des musulmans d’Espagne convertis de force au catholicisme au début du XVIe siècle – qui se déroula dans le Royaume de Valence où vivait une importante communauté morisque très fortement islamisée. En m’inscrivant dans la thématique de ce colloque, « l’heure fatale », je voudrais analyser ce drame, cet instant tragique, marqué par le destin, inscrit dans le temps, donc inévitable, selon certains auteurs apologistes de l’expulsion, un événement qui signifia la fin d’une histoire de près de neuf siècles de présence musulmane en Espagne (711-1609), une fin représentée dans une série de tableaux réalisés immédiatement après les faits – entre 1612 et 1613 – par la volonté de celui qui en fut l’artisan, le roi Philippe III.
Les travaux sur l’expulsion des Morisques sont très nombreux et, sans doute, l’approche de la commémoration de cet événement historique à Tunis en 2009 redonnera une impulsion à ces recherches [2]. Ici, je souhaiterais vous montrer ces tableaux, propriétés de la Fondation Bancaja [3], présentés dans leur ensemble au grand public pour la première fois lors d’une exposition en 1997.
En incluant l’étude-introduction du catalogue de l’exposition, à ma connaissance, il n’y a aujourd’hui que huit articles publiés [4] en Espagne sur ces tableaux, et pourtant un certain nombre de chercheurs les connaissent depuis 1990 ; par contre, de plus en plus d’auteurs les utilisent comme simples illustrations de leurs travaux sur les Morisques.
Aujourd’hui, grâce à Jesús Villalmanzo Cameno, chercheur aux Archives du Royaume de Valence et auteur de l’étude du catalogue, nous connaissons les auteurs de ces œuvres, nous pouvons aussi les dater avec précision et nous connaissons aussi les circonstances et les conditions dans lesquelles elles furent réalisées [5]. Il s’agit d’une commande passée par le roi Philippe III, à travers son vice-roi, le Marquis de Caracena ; les auteurs étaient tous des peintres contemporains des faits, qui jouissaient d’une reconnaissance au niveau local, dans le royaume de Valence ; il s’agit de Pere Oromig, Vicent Mestre, Jerónimo Espinosa et Francisco Peralta. Tous ces tableaux furent réalisés entre 1612 et 1613.
Pere Oromig est l’auteur de l’Embarquement des Morisques au Grao de Valence (1612-1613) ; avec Francisco Peralta il réalisa l’Embarquement des Morisques à Vinaròs et à Alicante (1612-1613). Vicent Mestre est l’auteur de l’Embarquement des Morisques à Dénia (1612-1613), de la Révolte des Morisques de la Muela de Cortes (1613) et du Débarquement à Oran (1613). Enfin, Jerónimo Espinosa réalisa la Révolte des Morisques de la Sierra de Laguar (1612-1613).
Les sept tableaux décrivent avec un réalisme extraordinaire des scènes dramatiques, des instantanés qui représentent les derniers moments de la présence des Morisques en Espagne. Ces instantanés retracent trois moments forts de l’opération qui commença au lendemain de la publication de l’édit d’expulsion des Morisques du Royaume de Valence, le 22 septembre 1609 ; ces trois moments sont l’embarquement, la résistance – très circonscrite étant donné le déploiement extraordinaire de forces armées et de milices – et le débarquement en Afrique du Nord, à Oran.
Nous sommes en présence d’une véritable chronique picturale de l’expulsion, la seule dont nous disposions aujourd’hui. Nous connaissons un dessin de 1627 de Vicente Carducho (Vincenzo Carducci) [6] qui se trouve au Prado de Madrid et nous avons des informations indirectes, car il disparut lors d’un incendie en 1734, au sujet du tableau qui permit à Vélasquez de remporter le concours qui lui ouvrit les portes de la Cour, un tableau intitulé Expulsión de los moriscos (1627) [7].
La collection Bancaja [8] est intéressante à plusieurs titres car elle nous propose un témoignage quasiment direct, à la manière d’un reportage, très proche dans le temps de cet événement tragique, événement majeur dans l’histoire de l’Espagne et de l’Europe de l’époque. L’historien français Henri Martin le décrivait en ces termes :
Il faut remonter aux antiques révolutions de l’Orient, à ces nations vaincues qu’on traînait tout entières hors de leurs foyers, à la captivité de Babylone, pour trouver des spectacles semblables à celui que vit l’Europe du XVIIe siècle [9].
Un historien espagnol contemporain d’Henri Martin, Matías Sangrador y Vitores, parlera quant à lui de « fatal décret d’expulsion », en insistant sur le fatum, destin irrévocable, annoncé par des prophéties [10] et inscrit en quelque sorte dans l’Histoire. Il reprenait les arguments des apologistes de l’expulsion qui considéraient que la Reconquista ne s’était pas achevée en 1492 mais en 1609 !
La décision d’expulser les Morisques fut prise au plus haut niveau de l’État le 4 avril 1609 pour des raisons religieuses et de sécurité, avec l’appui d’un secteur radical de l’Église [11] et la collaboration, obtenue en échange de garanties financières, de la noblesse locale et des seigneurs de Morisques directement affectés par la mesure.
Parmi les causes avancées pour justifier l’expulsion, il y avait les échecs successifs de la politique d’évangélisation et d’assimilation, la peur permanente d’une révolte comme celle de Grenade en 1568, la peur des actions de piraterie, des conspirations (les Morisques étaient considérés comme une cinquième colonne), la peur d’une nouvelle invasion musulmane (qui signifierait une seconde perte ou destruction de l’Espagne après celle de 711), le rejet de ce que représentaient les Morisques [12]. Le processus qui conduisit à l’adoption de cette mesure extrême fut long et tortueux.
Le principal idéologue fut l’archevêque de Valence, le patriarche Ribera, dont la position évolua vers la radicalité après qu’il eut constaté les échecs successifs des diverses campagnes d’évangélisation qu’il avait lui même encouragées ; il y avait aussi l’action d’un certain nombre d’auteurs, apologistes de l’expulsion [13], qui préparèrent le terrain en proposant une interprétation de l’histoire de l’Espagne qui insistait sur l’héritage des Wisigoths (ils régnaient au moment de la conquête musulmane) face aux éléments « atypiques » (juifs et musulmans). Pour ces apologistes, les Morisques, à qui ils ne reconnaissaient pas leur hispanité, représentaient un danger permanent pour l’identité « espagnole » dont la racine était catholique. Pour eux, les sept siècles de guerres de frontière légitimaient l’expulsion. C’est pourquoi ils insistaient tous sur les faits d’armes des rois castillans et aragonais contre l’islam. Ils louaient l’action des Rois Catholiques, de Charles Quint et de Philippe II, mais ils leur reprochaient d’avoir toléré cette présence en Espagne. Leur héros était Philippe III, le Lion, qui avait enfin achevé la Reconquista, cette fois pour de bon, et délivré l’Espagne de cette engeance (cela faisait partie du genre de la polémique antijuive et antimusulmane d’attaquer l’adversaire en utilisant un vocabulaire très agressif).
L’historiographie, jusqu’à nos jours, présente ce monarque, qui avait inauguré en Espagne le règne des favoris, comme un roi désintéressé des affaires de l’État, qui les laissait toutes entre les mains de Francisco Gómez de Sandoval y Rojas, duc de Lerma, son favori et pièce maîtresse dans l’application des décrets d’expulsion.
Dans un numéro spécial de la revue La aventura de la Historia consacré à Philippe III, l’article de Ricardo García Cárcel s’intitule « Biographie d’un roi médiocre » [14]. Mais Rafael Benítez Sánchez-Blanco, après avoir analysé une série de documents (comptes rendus de réunions du Conseil d’État) de 1601 à 1609, insiste sur le rôle joué par Philippe III dont la religiosité exacerbée, la peur d’un châtiment divin, l’influence des thèses favorables à l’expulsion ainsi qu’un problème d’ordre psychologique, la volonté de surpasser son père, le poussèrent à prendre cette décision drastique [15].
Pour le commentaire des tableaux, je me suis intéressé à l’œuvre de l’un de ces apologistes, Gaspar Aguilar, auteur de Expulsión de los moros de España en 1610 ; le titre illustre bien sa position idéologique, les Morisques étaient pour lui des Maures, ils étaient arrivés en Espagne en tant que musulmans, ils la quittèrent en tant que tels. Malgré leur conversion forcée au christianisme au début du XVIe siècle, pour l’auteur ils étaient aussi musulmans que leurs ancêtres, et en cela il n’avait pas tort, car comme le souligne Luis F. Bernabé Pons, l’islam était ce qui identifiait et unissait la grande majorité des Morisques, mais leur islam ne pouvait pas être le même que celui du monde musulman [16] à cause de la répression menée par les autorités politiques et religieuses avec l’aide de l’Inquisition. Par contre, en les désignant comme des Maures, des musulmans, Aguilar, contrairement à Pedro de Valencia [17], par exemple, ne reconnaissait pas leur hispanité.
À son propos, Antonio Domínguez Ortíz et Bernard Vincent soulignent que son témoignage « produit une impression saisissante ; s’il était loin de mériter, comme poète, les lauriers d’Apollon, il sut, comme observateur, nous donner une vision directe, d’une grande valeur historique et humaine » [18].
Le fait qu’un exemplaire de l’œuvre d’Aguilar ait été trouvé dans la bibliothèque de Pere Oromig, l’un des peintres dont je vais parler ici, m’a amené à m’intéresser à son livre, qui a fait l’objet d’une édition critique en 1999. Des huit chants qui composent ce poème épique, nous pouvons affirmer que les chants III à VI et le VIII, qui décrivent les scènes de révoltes et l’arrivée à Oran, ont très certainement inspiré nos peintres. Mais d’après Villalmanzo on pourrait aussi ajouter Gaspar de Escolano, l’historien de Valence auteur des Décadas de la insigne y coronada ciudad y Reyno de Valencia (1610) pour la description des révoltes et Jaime Bleda auteur de Defensio fidei in causa neophytorum, sive morischorum Regni Valentiae (1610).
Les tableaux de la collection Bancaja nous proposent une vision officielle de la première vague d’expulsion des Morisques d’Espagne, une vision qui se voulait objective. Les apologistes eux, avaient fait le travail de propagande en amont et avaient préparé le terrain pour faire accepter la mesure. Mais quelle était la vraie intention du monarque ? Pourquoi le réalisme prend-il le dessus sur l’éloge de la Monarchie ? Philippe III souhaitait disposer d’un témoignage direct, une sorte de reportage fidèle à la réalité. Dans sa commande, il insistait sur la représentation exacte des lieux –ports, villes, fortifications et système défensif côtier – et souhaitait que les peintres fussent locaux, connaisseurs de la géographie locale et, dans la mesure du possible, des témoins directs de l’événement.
Ce ne sont pas, à proprement parler, des documents à la gloire de la monarchie mais une lecture-observation attentive et intertextuelle nous permet d’y déceler tout de même, à travers l’influence des chroniques narratives et des arguments qui alimentent ces œuvres, une certaine propagande justificative de l’expulsion.
Ces tableaux ont un caractère informatif, didactique, historique, politique et artistique indéniable. Ils sont une sorte de témoignage pour la postérité de l’action de ce « grand roi » que fut Philippe III. Il fallait montrer que l’action avait été menée de manière pacifique (à l’exception des deux révoltes), proprement, sans verser une seule goutte de sang ; telle était l’obsession des autorités et c’est ce sur quoi insistent quatre des sept tableaux ; il fallait montrer aussi, et surtout, la collaboration des élites du royaume de Valence, principales affectées par la mesure et opposées, jusqu’au dernier moment, à cette expulsion pour des raisons financières. Enfin, il fallait montrer que les Morisques méritaient leur châtiment avec les massacres d’Oran.
1. L’heure fatale : l’embarquement des Morisques à Valence, Vinaròs et Dénia
Tableau peint par Pere Oromig. À la manière d’un documentaire, ce tableau, l’un des plus beaux de la collection, décrit dans le détail l’opération d’embarquement des Morisques dans le Grao, quartier aujourd’hui disparu qui jouxtait le port de Valence, le jour de la visite du vice-roi de Valence, le 3 octobre 1609. Ce tableau est un véritable instantané du moment où ils furent obligés d’abandonner le pays qui les vit naître.
Nous pouvons diviser ce tableau en trois parties allant de gauche à droite. Dans la partie de gauche, les protagonistes sont les Morisques, que l’on voit au premier plan attendant leur tour sur les quais et au deuxième plan sur des embarcations et sur un embarcadère. La seconde partie, qui occupe la partie centrale du tableau, décrit le port et la place où trône une croix imposante, au centre. Au premier plan des scènes de vie, beaucoup de dynamisme, de couleurs ; les protagonistes ici sont la haute société de Valence, les nobles, les seigneurs de Morisques, le vice-roi, les commissaires chargés de superviser l’expulsion et les militaires. La troisième partie occupe la partie droite du tableau et représente le quartier du Grao de Valence avec sa muraille fortifiée ; ici les protagonistes sont les nombreux spectateurs et curieux.
Les Morisques, pourtant protagonistes malgré eux de cet événement, semblent dans ce tableau insignifiants ; ils ne sont plus là, ce sont des petits personnages si on les compare avec la taille disproportionnée des représentants de la noblesse locale et du pouvoir.
Dans la partie occupée par les Morisques, les scènes dramatiques sont abondantes ; des petits groupes attendent, résignés, en discutant ; des vieillards, des femmes, des enfants assis sur des ballots où étaient enveloppés les quelques biens qu’ils purent emporter avec eux. D’autres groupes de Morisques arrivent au loin. D’après l’indication que nous donne l’un des commissaires du tableau, il y eut 15615 expulsés, mais ce chiffre est corrigé par Manuel Ardit [19] qui propose 17776. La volonté informative de l’auteur du tableau et la recherche d’une certaine « objectivité » sont évidentes ; nous le voyons à travers les indications écrites insérées directement dans le tableau ou l’encadrant dans des médaillons, mais les scènes dramatiques sont clairement d’inspiration littéraire, comme le souligne Villalmanzo en décelant les influences de l’œuvre de Jaime Bleda ou de Gaspar Escolano [20] et comme nous l’avons constaté aussi à partir de la lecture de l’œuvre d’Aguilar. Nous pouvons le voir, par exemple, avec la description dramatique du vieillard porté par deux jeunes (premier plan à gauche) qui est la version picturale de la description littéraire de Bleda [21]. On pourrait multiplier les exemples avec les scènes déchirantes de Morisques se séparant en pleurs de leurs seigneurs (premier plan et second plan à côté de la Croix) ou la représentation de l’un des problèmes les plus déchirants et dramatiques posé par l’expulsion des Morisques, celui des enfants ; d’après le décret d’expulsion, les enfants de moins de six ans pouvaient rester à Valence avec le consentement de leurs parents mais, comme le montrent les rappels à la loi [22] ou les témoignages des apologistes de l’expulsion, de nombreux enfants furent enlevés par les vieux-chrétiens. Le tableau reprend cette scène au premier plan, où l’on voit un Morisque embrassant sa fille, vêtue comme les dames de la noblesse qui la garderont.
Sur la place où trône, triomphante, au centre de la composition, la Croix, le dynamisme est accentué par le mouvement des charrettes, des carrosses des nobles, des porteurs et des Morisques. Les responsables de l’opération sont présents au premier plan, à droite. En premier lieu, le vice-roi, Don Luis Carrillo de Toledo, Marquis de Caracena, portant sur le torse la croix de l’ordre de Saint-Jacques (une note le désigne dans le tableau) ; à cheval, le responsable militaire de l’opération terrestre, le général Don Agustín Mexía à qui Gaspar Aguilar consacre un long éloge [23] ; des militaires de l’armée royale (arborant la Croix de Saint-André), des collaborateurs du vice-roi, dont le docteur Francisco Pablo de Vaciero avec une feuille indiquant 15615, le nombre d’expulsés par le port de Valence. Au second plan, à droite, nous pouvons voir aussi la présence de la milice, dont le rôle fut très important pour le bouclage du territoire avant et pendant les opérations.
Aux fenêtres et balcons, des tâches représentent la multitude de curieux venus assister à cet instant fatal pour les Morisques, heure heureuse pour nombre de ces vieux-chrétiens qui voyaient s’éloigner ces navires dont les voiles, gonflées par le vent, ressemblaient à de minuscules croissants, lointains souvenirs de la présence de l’islam en Espagne.
La composition de ce tableau nous semble très intéressante et très révélatrice de l’intention qu’avait Philippe III en passant sa commande ; Pere Oromig, nous semble-t-il, s’est bien acquitté de sa tâche en plaçant les élites locales au premier plan et en les représentant de manière disproportionnée par rapport aux Morisques. On doit lire le tableau en commençant par la droite, où se trouvent les vrais protagonistes officiels : les représentants du pouvoir local. Les Morisques sont repoussés vers la mer, leur figure est minuscule, quasi insignifiante, une page a été tournée.
Un autre point important, et qui tient aussi de la propagande, est l’absence de violence, de tension. Les chroniqueurs apologistes de l’expulsion, insistèrent sur cette absence de violence et décrivirent des scènes de joie, de gaieté, que l’on retrouve dans les tableaux consacrés à l’embarquement des Morisques, en particulier le tableau de l’embarquement à Dénia. Dans le port de Valence, ce qui frappe c’est la résignation de ces Morisques, ce fatalisme qui les conduit à accepter leur triste sort sans s’y opposer ; on voit des petits groupes de Morisques qui discutent entre eux, d’autres avec des vieux-chrétiens, des mères rassurent leurs enfants en les caressant ; et pourtant, les scènes de violences furent nombreuses. Les propres chroniqueurs, qui insistent souvent sur le caractère de châtiment divin mérité de l’expulsion, s’émeuvent des scènes de pillages, de vols, de viols, de crimes, d’abus commis par les vieux-chrétiens, civils et militaires, sur le chemin de l’exil, à l’entrée du port et en pleine mer, et ce malgré les menaces des autorités.
Ce tableau, ainsi que les suivants, pose aussi le problème de l’écriture de l’Histoire, des sources et surtout de la fiabilité de celles-ci. Nul doute que ce document, cette chronique picturale, est une source historique de premier ordre pour l’étude de l’expulsion des Morisques. Il ne s’agit pas à proprement parler d’une œuvre de propagande comme le fut le tableau de Velázquez qui, d’après la description de Stirling-Maxwell, était une véritable œuvre apologétique dans laquelle Philippe III apparaissait en toute Majesté, triomphant des Morisques enchainés [24].
Pere Oromig reflète une réalité, décrit avec minutie des paysages, des villes, des ports qu’il connaît bien, il décrit aussi des scènes dont il a certainement été témoin. Il a un souci du détail évident, comme nous pouvons le constater dans la description minutieuse des vêtements des Morisques, des nobles, des autorités et aussi dans celle des navires ; il a une volonté didactique que montrent les annotations ajoutées pour illustrer son tableau et un souci de fidélité que nous pouvons voir dans la description du quartier du Grao avec ses murailles. Mais cette œuvre devient à son tour œuvre de propagande lorsque nous décelons ici et là des emprunts à des œuvres qui justifiaient l’expulsion.
Avec Francisco Peralta, Pere Oromig est aussi l’auteur de l’Embarquement des Morisques à Vinaròs et Alicante (1612-1613). Selon Manuel Ardit, 15208 Morisques embarquèrent dans le premier port et 30204 dans le second. Ces tableaux, qui suivent le même schéma narratif que le premier sont d’une facture plus simple avec quelques licences spatio-temporelles de la part des auteurs, qui télescopent dans le même tableau, celui de Vinaròs, l’expulsion des Morisques de Valence (1609) et celle, plus tardive, des Morisques d’Aragon et de Catalogne (1610) qui sortirent par les ports des Alfaques (Catalogne) et Moncofa à 100 km de Vinaròs.
Dans la série des embarquements, un autre tableau est très intéressant ; il s’agit de l’Embarquement des Morisques à Dénia (1612-1613) peint par Vicent Mestre ; avec le premier, c’est l’un des plus beaux de la collection. Il y eut d’après Manuel Ardit 42518 embarqués. Selon Villalmanzo, son intérêt pour les historiens qui travaillent sur le système défensif mis en place pour lutter contre les attaques des pirates barbaresques, alliés des Morisques de la région, est très grand. D’ailleurs, dans ce tableau le plus important semble être l’ensemble architectural de la ville, les hommes occupant l’espace libre. Le rôle principal est partagé entre les Morisques et les imposantes forces militaires terrestres et navales. Dans la description des scènes morisques, notre peintre reprend « textuellement » les descriptions faites par Bleda pour Alicante [25] mais aussi celles qui insistent sur les scènes de joie et de bonheur, comme nous pouvons le voir ici avec la représentation des femmes morisques dansant accompagnées par des musiciens morisques ; sur la plage, des scènes de cirque, de foire et de lutte devant des spectateurs qui attendent leur embarquement. L’heure fatale devient ici heureuse pour tout le monde.
2. La résistance : révolte des Morisques de la sierra de Laguar et Muela de Cortes (octobre-novembre 1609) dans la région d’Alicante
Malgré la volonté des autorités d’éviter un soulèvement des Morisques, celles-ci ne purent empêcher quelques incidents graves. Il fut relativement facile d’expulser les Morisques des alentours de la capitale du royaume ou ceux qui se trouvaient dans des zones accessibles, mais en ce qui concerne ceux des zones de l’intérieur et surtout des zones montagneuses, on assista à de véritables scènes de guerre. Les causes de ces soulèvements furent multiples : le très court délai pour quitter le pays, trois jours, ce qui ne laissait pas le temps de vendre convenablement les biens, les exactions commises par les vieux-chrétiens mais aussi les mauvaises nouvelles en provenance d’Afrique du Nord qui faisaient état d’exactions commises par les populations autochtones.
Le tableau intitulé Rébellion des Morisques de la Sierra de Laguar fut peint par Jerónimo de Espinosa en 1612-1613. Il représente la principale réaction violente des Morisques contre l’expulsion, en octobre, un mois après le premier décret d’expulsion des Morisques de Valence (22 septembre1609). Le caractère de chronique est accentué par la profusion d’informations écrites. Villalmanzo insiste sur l’influence des écrits de Gaspar Escolano [26]. Cette révolte inspira aussi notre auteur Gaspar Aguilar [27] à tel point que nous retrouvons mot pour mot, image pour image, une correspondance quasi exacte des scènes de guerre que nous avons ici.
Les troupes espagnoles occupent la quasi-totalité du tableau et de l’espace et mènent l’offensive, acculant les Morisques à se replier et à résister en haut de la montagne. La supériorité militaire et morale des troupes chrétiennes est évidente ; elles représentent l’ordre, la discipline, le courage. Face aux armes à feu, les Morisques n’avaient que des pierres à moulin et des pierres à leur opposer. Même si dans le tableau on peut voir quelques armes à feu du côté des révoltés, les mesures draconiennes prises par les autorités tout au long du XVIe siècle pour interdire le port d’armes aux Morisques furent vraisemblablement efficaces malgré la contrebande. Les Morisques sont représentés dans le désordre ; ici aussi la proportion des figures n’est pas respectée, les soldats espagnols sont plus grands, les Morisques ne sont que des taches, à l’exception du chef de la révolte, Millini (sur la montagne à gauche), qui apparaît avec une couronne au moment où il va recevoir un coup de lance mortel. Aguilar reprend le dialogue entre le chef des Morisques et le chef des chrétiens, Don Agustín Mexía, qui se trouve au premier plan à gauche à cheval. Les descriptions d’Aguilar sont très manichéennes ; d’un côté les bons, les vieux-chrétiens, et d’un autre les méchants, les Morisques. Paradoxalement, la description qu’il nous fait du chef morisque est positive, il est le courageux descendant de princes maures, né en Espagne, donc espagnol [28], prêt à mourir pour son peuple. Le reste des Morisques est dépeint d’une manière plus négative [29]. C’est qu’il fallait que le chef des Morisques soit à la hauteur du commandant des troupes chrétiennes, noble, descendant des vaillants Wisigoths, les « vrais Espagnols ».
La reddition eu lieu le 29 novembre 1609 et le bilan fut assez lourd, quelque 2000 morts, pour la plupart morisques.
Le tableau Rébellion des Morisques de la Muela de Cortes, peint par Vicent Mestre en 1613 représente, des scènes de combat qui eurent lieu dans la même zone géographique. Le schéma est le même, concentration dans un espace réduit d’éléments distants dans la réalité, par exemple les localités, supériorité et ordre des troupes chrétiennes et résistance désespérée et désordonnée des Morisques en haut de la montagne ; ici aussi l’intertextualité avec l’œuvre d’Aguilar est très présente. De nombreuses scènes sont l’illustration exacte de passages du livre : le suicide des femmes morisques qui se jettent de la montagne (à droite) par peur des représailles ou des viols [30], les scènes bucoliques de Morisques gardant leur troupeaux, la destruction des chemins conduisant en haut de la montagne, l’utilisation des pierres à moulin comme armes défensives, l’arrestation du chef, ici El Turigi [31] ; la scène du ruisseau illustre avec exactitude le texte de Gaspar Escolano [32].
3. La terre promise ? Débarquement à Oran
Le Débarquement des Morisques dans le port d’Oran, œuvre de Vicente Mestre (1613) est le dernier tableau de la collection ; comme dans le premier, nous avons ici une profusion de détails.
Le premier plan représente l’arrivée des navires à Oran (espagnole jusqu’en 1792) et le second plan, le campement morisque attaqué par les tribus berbères autochtones. La description correspond à celle que fait Damián Fonseca dans le chapitre XII et XIII de sa Justa expulsión de los moriscos de España (1611) et au chant VIII du livre de Gaspar de Aguilar [33].
Mikel de Epalza [34] considère que ce tableau prétend montrer combien le châtiment divin était mérité car ils furent massacrés par leurs propres coreligionnaires. Il y a une sorte de moral de l’histoire, les musulmans étaient foncièrement mauvais et méritaient ce qui leur arrivait.
Le centre du tableau, la zone de tente avec la demi-lune, représente des scènes de massacre des Morisques par les autochtones. Il y aurait, toujours d’après Epalza, quelques erreurs dans la représentation des lieux pour des raisons stratégiques et de propagande ; il fallait ici insister sur le massacre. Normalement, à l’emplacement de la plage, il y avait une falaise. La plage se trouvait à l’ouest, entre la forteresse qui apparaît au premier plan et la forteresse de Mazalquivir, qui ne figure pas dans le tableau. Les autorités espagnoles cherchèrent un endroit propice pour débarquer ces milliers de personne, loin des ports militaires musulmans (Alger, Cherchell, Tétouan) ; le lieu choisi permettait de protéger la flotte.
Les Morisques ne furent pas accueillis par les autorités espagnoles d’Oran, et l’accueil par les autorités musulmanes ne fut pas préparé (n’oublions pas qu’ils étaient ennemis), ce qui expliquerait l’agressivité des populations locales, pauvres, qui subissaient une dure sécheresse et qui considérèrent ces Morisques comme des envahisseurs. Ces populations furent durement réprimées par les autorités marocaines et d’Alger, qui envoyèrent des troupes.
Aucune structure d’accueil n’avait été prévue. Cette première vague d’expulsions qui avait très bien été organisée pour le territoire espagnol fut un véritable échec en Afrique du Nord ; pour Epalza, ce fut un travail bâclé, qui s’acheva dans un véritable carnage. Les rescapés furent conduits vers les villes où ils s’installèrent sans problème. L’accueil agressif mit des mois à être corrigé.
Terrible sort que celui de cette minorité arrachée de sa terre natale, dépouillée de ses biens en Espagne, pendant le trajet en mer et à l’arrivée. Considérés comme des musulmans en Espagne, accueillis comme des envahisseurs en terre d’islam, ils finirent, après une période de réislamisation, par s’intégrer à leur nouvelle société d’accueil.
L’échec de cette première expulsion conduisit les autorités espagnoles à chercher d’autres voies. Après les Morisques de Valence, ce fut le tour des Andalous, des Castillans et des Murciens visés par le décret du 12 janvier 1610 et des Aragonais visés par le décret du 29 mai 1610. En tout, environ 300000 Morisques abandonnèrent l’Espagne. Certains, quelque 50000, passèrent par la France [35], d’autres s’installèrent en Turquie [36].
Le destin tragique des Morisques ne s’arrêta pas là ; une nouvelle vie les attendait ailleurs, mais le prix à payer fut élevé. La plupart d’entre eux échoua au Maghreb où, après une phase difficile de réislamisation, ils finirent par s’intégrer à leurs nouvelles patries : Tunisie, Maroc, Algérie, Turquie, dans l’armée, l’artisanat, l’agriculture et le commerce. Il y eut aussi des retours en Espagne, et même des Morisques qui réussirent à braver l’interdiction de rester en Espagne, bénéficiant souvent de la complicité de leurs compatriotes vieux-chrétiens.
Dans notre civilisation de l’image, le récit pictural de cette heure fatale que fut l’expulsion des Morisques apporte un témoignage exceptionnel des derniers instants de leur présence en Espagne. Cette série de tableaux dérange et secoue par son réalisme ; quatre siècles se sont écoulés depuis et malheureusement des millions de personnes ont été déplacées et continuent de l’être. Si au moins de genre de témoignage pouvait servir à quelque chose…
Notes
[1] Youssef El Alaoui, « Du ʻmoroʼ au Morisque. Construction et évolution d’une image de l’altérité dans l’Espagne des XVIe et XVIIe siècles », Colloque international organisé par le Groupe d’Étude sur le Moyen-Âge et le Seizième siècle (Université de la Manouba) et le Centre d’Étude et de Recherches Éditer/Interpréter (Université de Rouen), Jeudi 13 et vendredi 14 avril 2006, Université de la Manouba, Faculté des Lettres, Tunis.
[2] Congrès International « Los Moriscos : Historia de una Minoría », Grenade, 13-16 mai 2009, en ligne : http://www.moriscos2009.com. Voir aussi : http://www.materialesdehistoria.org/congreso_granada_2009.htm. 4e centenaire de l’expulsion des Morisques d’Andalousie (1609-2009), XIVe Congrès international et exceptionnel d’études morisco-andalouses, Fondation Temimi, Tunisie, du 20 au 23 mai 2009. Pour un bref aperçu voir : Antonio Domínguez Ortíz et Bernard Vincent, « La tragédie se répète : le bannissement des Morisques », in Chrétiens, musulmans et juifs dans l’Espagne médiévale. De la convergence à l’expulsion, Paris, Les Éditions du Cerf, 1994, p. 301-333 ; Rafael Benítez Sánchez-Blanco, Heroicas decisiones. La Monarquía Católica y los moriscos valencianos, Valencia, Institució Alfons El Magnànim, 2001, p. 352-431 ; Manuel Ardit, « Los moriscos valencianos », in La expulsión de los moriscos del reino de Valencia, Catalogue de l’exposition de Valence, Fundación Bancaja, 1997, p. 17-33 ; Mikel de Epalza, Los moriscos antes y después de su expulsión, Alicante, Biblioteca Virtual Cervantes, 2001, disponible en ligne : http://www.cervantesvirtual.com/ser… ; Mikel de Epalza, « Los moriscos y sus descendientes, después de la expulsión (después del cuadro del desembarco en Orán) », in La expulsión de los moriscos. 14 de octubre de 1997-9 de junio de 1998, Valencia, Bancaja, 1998, p. 43-70 ; ce volume rassemble les actes d’un colloque sur l’expulsion des Morisques qui complétait l’exposition de Bancaja.
[3] http://obrasocial.bancaja.es/cultur…. Des sept tableaux de la collection, six sont propriétés de Bancaja, le septième, l’Embarquement des Morisques à Alicante appartient à un particulier.
[4] Pour cette présentation, j’ai consulté : Asunción Alejos Morán, « Crónica pictórica de la expulsión de los moriscos valencianos », in Cimal. Cuadernos de Cultura Artística, 16, 1982, p. 50-59 ; l’étude la plus complète aujourd’hui, celle de Jesús Villalmanzo Cameno, « La Colección pictórica sobre la expulsión de los moriscos. Autoría y cronología », in La expulsión de los moriscos del reino de Valencia, catalogue de l’exposition de Valence, Fundación Bancaja, 1997, p. 35-68 et Appendice documentaire, p. 71-107 ; Ángel Pérez Martínez, « La expulsión de los moriscos en la pintura valenciana del siglo XVII », in Día 4 que fuera, Villena (Alicante), Ayuntamiento de Alicante, 1998, p. 220-229 ; Luis F. Bernabé Pons, « Una crónica de la expulsión de los moriscos valencianos. Los cuadros de la Fundación Bancaja », in Sharq al-Andalus, nº 14-15, 1997-1998, p. 535-538. Article consultable en ligne : http://www.cervantesvirtual.com/ser… ; un dépliant de Rosa María Bueso dans le dossier « Felipe III. Poco rey para tanto reino », in La Aventura de la Historia, año 1, nº 9, julio 1999, entre les pages 66 et 67.
[5] Jesús Villalmanzo Cameno, « La Colección pictórica… », art. cit.
[6] La expulsión de los moriscos de España, dessin de 1627, disponible en ligne : http://www.museodelprado.es/es/subm…. De nombreux dessins, dont ceux de Christoph Weiditz (1529), sur les Morisques en général en ligne : http://imageevent.com/moriscos/moros
[7] Sir William Stirling Maxwell, Velázquez and his work, London, 1855, chap. IV, p. 101-103 ; Asunción Alejos Morán, « Crónica pictórica… », art. cit., p. 58-59.
[8] http://obrasocial.bancaja.es/cultur…
[9] Henri Martin, Histoire de France, 1857, p. 560.
[10] Matías Sangrador y Vitores, Memoria sobre la expulsión de los moriscos de España en el reinado de Felipe III, Valladolid, 1858, p. 9 et p. 34-35 ; en ce qui concerne l’abondance de prophéties à la veille de l’expulsion, voir par exemple Grace Magnier, « Millenarian prophecy and the mythification of Philip III at time of the expulsion of the moriscos », in Sharq al-Andalus, nº 16-17, 1999-2002, p. 187-209 disponible en ligne : http://www.cervantesvirtual.com/ser…
[11] Pour Henri Martin, op. cit., p. 560, « la responsabilité de ce grand attentat contre l’humanité porte exclusivement sur le catholicisme espagnol ; la papauté refusa de s’y associer ».
[12] Voir certains des ouvrages des notes 2 et 4 ; une vision traditionnelle et conservatrice, qui justifie l’expulsion dans l’œuvre posthume de Gregorio Marañón, Expulsión y diáspora de los moriscos españoles, Madrid, Taurus, 2004 ; voir aussi l’étude de Manuel Ruiz Lagos qui précède l’édition critique de l’œuvre de Gaspar Aguilar, Expulsión de los moros de España (1610), Alcalá de Guadaira, Ed. Guadalmena, 1999, p. 26-45.
[13] Pour le rôle de Ribera, voir Rafael Benítez Sánchez-blanco, Heroicas…, op. cit., p. 400-420. Voir bibliographie de ces apologistes dans José María Perceval, Todos son uno. Arquetipos, xenofobia y racismo. La imagen del morisco en la Monarquía española durante los siglos XVI y XVII, Almería, Instituto de Estudios Almerienses, 1997, p. 25-40 ; citons par exemple Jaime Bleda, Defensio fidei in causa neophytorum siue Morischorum Regni Valentiae totiusque Hispaniae, Valencia, 1610, extraits disponibles en ligne : http://www.cervantesvirtual.com/ser… ; Marcos de Guadalajara y Javier, Memorable expulsión y iustissimo destierro de los moriscos de España, 1613, suivi de Juan Ripol, Diálogo de consuelo por la expulsión de los moriscos, 1613 disponibles en ligne : http://www.cervantesvirtual.com/Fic… ; Gaspar Escolano, Década primera de la historia de la insigne y coronada ciudad y reyno de Valencia, 1610 disponible en ligne à la Biblioteca Valenciana Digital, http://bv2.gva.es.
[14] Ricardo García Cárcel, « Biografía de un rey mediocre », in La Aventura de la Historia, op. cit., p. 46-50 et 51-59.
[15] Rafael Benítez Sánchez-Blanco, Heroicas decisiones…, op. cit., p. 360-361.
[16] Luis F. Bernabé Pons, « Desheredados de Al-Andalus. La cultura de mudéjares y moriscos », in La herencia de Al-Andalus, sd. Fátima Roldán Castro, Sevilla, 2007, p. 60 ; ibid., « Aspectos lingüísticos árabes y religiosos islámicos en los estudios sobre mudéjares y moriscos (1975-2005) », in 30 años de mudejarismo : memoria y futuro (1975-2005), X Simposio internacional de mudejarismo, Teruel, 14-15-16 de septiembre de 2005, Teruel, 2007, p. 297-329.
[17] Pedro de Valencia, Tratado acerca de los moriscos, (1606), ed. de Joaquín Gil Sanjuán, Málaga, Algazara, 1997, p. 78-81, considérait que les Morisques étaient des Espagnols au même titre que les vieux chrétiens car cela faisait presque 900 ans qu’il vivaient en Espagne.
[18] Antonio Domínguez Ortíz et Bernard Vincent, « La tragédie se répète… », art. cit., p. 308.
[19] V. supra note 2.
[20] Jesús Villalmanzo, « La colección… », art. cit., p. 51, 59, 62. En ce qui concerne l’œuvre d’Escolano, op. cit., il ne fait aucun doute qu’elle a très largement inspiré nos peintres pour l’élaboration des deux tableaux sur les révoltes ; nous avons relevé plusieurs détails à partir du Livre X, chap. 49, p. 1867 jusqu’au chap. 52.
[21] Jesús Villalmanzo, art. cit., p. 51.
[22] De nombreux textes dans Pascual Boronat y Barrachina, Los moriscos españoles y su expulsión, t. II, Granada, Universidad de Granada, 1992, chap. VI, p. 170-177 ; doc. 14, p. 522-544 ; doc. 23 à 25, p. 571-588.
[23] Expulsión de los moros, op. cit., chant I, v. 369-400, p. 153-155.
[24] « In the centre of this composition in which Velazquez was degraded by the evil spirit of the age into a panegyrist of cruelty and wrong, appeared Philip III, mean in figure, and foolish in face, pointing with his truncheon to the sea, where ships were riding, and whither some christian soldiers were conducting a company of Moors and their weeping women and children ; and on his right, Spain in the form of a stately dame, armed in Roman fashion, sate at the base of a temple, benignly smiling on the oppressors. On a pedestal, the following inscription explained the subject of the picture, and a bigot’s notions of piety and justice, peace and good will to men », Velazquez and his works, Londres, 1855, p. 101-102. Voir aussi Asunción Alejos Morán, « Crónica pictórica… », art. cit., p. 58.
[25] Villalmanzo, op. cit., p. 59.
[26] Gaspar Escolano fait état d’incidents à Valence au lendemain de la scène décrite par notre premier tableau, op. cit., Livre X, chap. 51, p. 1889 ; les chapitres 52 à 59, p. 1893-1973 décrivent dans le détail les opérations.
[27] Gaspar Aguilar, Expulsión…, op. cit., chant III, p. 211-240 et chant IV, p. 241-264.
[28] Ibid., p. 227-228.
[29] Ibid., p. 248.
[30] Ibid., chant I, v. 1257-1292 et chant VIII, v.4193-4200.
[31] Ibid., chant V, p. 265-293, chant VI, p. 295-316.
[32] Gaspar Escolano, op. cit., Livre X, chap. 59, p. 1969 ; cette description parle aussi de trois jeunes Morisques qui décidèrent de se jeter à cause de la soif et de la faim.
[33] Gaspar Aguilar, Expulsión…, op. cit., v.4225-4256.
[34] Pour plus de précisions sur l’installation des Morisques à Alger, Tunis ou au Maroc, voir Mikel de Epalza, Los Moriscos antes y después …, op. cit., disponible en ligne : http://www.cervantesvirtual.com/ser… ; voir aussi du même auteur, « Los moriscos y sus descendientes… », art. cit., inspiré par ce tableau.
[35] Louis Cardaillac, « À propos du passage des Morisques par le Languedoc. Réflexion sur l’expulsion », in Questionnement des formes. Questionnement du sens, Montpellier, Editions du CERS, 1997, p. 567-577.
[36] Mikel de Epalza, « Instalación de moriscos en Anatolia (documento Temimi, de 1613) » , in Sharq al-Andalus, nº 13, 1996, p. 145-157. Disponible en ligne : http://www.cervantesvirtual.com/ser…
Pour citer l'article:
Youssef El Alaoui, « L’expulsion des Morisques de Valence (1609). L’heure fatale à travers les tableaux de la collection Bancaja (1612-1613) », in L’instant fatal, Actes du colloque international organisé par le CÉRÉdI et le GEMAS (Université de la Manouba, Tunis), les jeudi 13 et vendredi 14 décembre 2007, édités par Jean-Claude Arnould.
(c) Publications numériques du CÉRÉdI, "Actes de colloques et journées d’étude", n° 3, 2009.
URL: http://ceredi.labos.univ-rouen.fr/public/?l-expulsion-des-morisques-de.html
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